la Loi de Finances pour l’année budgétaire 2016

 la Loi de Finances pour l’année budgétaire 2016 (LF 2016)




Les principales mesures fiscales de la Loi de Finances pour l’année budgétaire 2016 (LF 2016) sont ici présentées impôt par impôt dans l’ordre des dispositions codifiées dans le Code général des impôts (CGI).
 
1 - Mesures spécifiques à l’impôt sur les sociétés ("IS")
Charges non déductibles
Jusqu’à l’entrée en vigueur de la LF 2016, les dépenses afférentes aux charges visées à l’article 10-I (A, B et E)  (voir note 1 à la fin] ainsi que les dotations aux amortissements relatives aux immobilisations (pour lesquelles le montant facturé est égal ou supérieur à 10 000 dirhams), dont le règlement n’était pas justifié par chèque barré non endossable, effet de commerce, moyen magnétique de paiement, virement bancaire, procédé électronique ou par compensation avec une créance à l’égard d’une même personne, à condition que cette compensation soit effectuée sur la base de documents dûment datés et signés par les parties concernées et portant acceptation du principe de la compensation, n’étaient déductibles qu’à concurrence de 50% de leur montant.
La LF 2016 a modifié cette règle, puisque ces charges ne sont désormais déductibles que dans la limite de 10 000 dirhams par jour et par fournisseur sans dépasser 100 000 dirhams par mois. Les dotations aux amortissements susvisées ne sont quant à elles plus déductibles.  
La Direction générale des impôts (DGI) a précisé dans la Note circulaire n°726 relative aux dispositions fiscales de la LF 2016 que "Les montants de dix mille (10 000) dirhams et de cent mille (100 000) dirhams précités s’entendent, taxe sur la valeur ajoutée comprise."
 
Instauration d’un barème proportionnel en matière d’impôt sur les sociétés selon des tranches de bénéfices
Antérieurement au 1er janvier 2016, le taux normal de l’impôt sur les sociétés était fixé à 30%.
La loi de finances 2016 a instauré des taux d’impositions sur les sociétés proportionnels selon le barème suivant :
Montant du bénéfice net en dirhams
Taux
 Inférieur ou égal à 300 000 DH
10%
 De 300 001 à 1 000 000 DH
20%
 De 1 000 001 à 5 000 000 DH
30%
 Au-delà de 5 000 000 DH
31%
[rappel : 1 000 dirhams = 93 euros, NDR]
Les établissements de crédit et organismes assimilés, Bank Al Maghrib [banque centrale], la Caisse de dépôt et de gestion (CDG), les sociétés d’assurance et de réassurance demeurent imposables au taux de 37%.
La DGI a précisé dans la note circulaire n°726 précitée que le bénéfice net fiscal s’entend du bénéfice imposable déterminé après imputation des déficits reportables.
Les plus-values de cession réalisées par des sociétés étrangères qui sont imposables au Maroc sont soumises à ce barème selon les informations que nous avons pu obtenir de la DGI. Ce point fera certainement l’objet d’une précision écrite.
 
2 - Mesures spécifiques à l’Impôt sur le Revenu (IR)
Suppression des dispositions relatives au bénéfice de la déduction des intérêts de prêt pour l’acquisition d’un logement destiné à l’habitation principale dans le cadre d’indivision.
Jusqu’à présent, en cas d’acquisition de logements dans le cadre de l’indivision, les dispositions de l’article 28-II du CGI prévoyaient la déductibilité du montant des intérêts ou du montant de la rémunération convenue d’avance, dans la limite de 10% du revenu global imposable, pour chaque co-indivisaire, à concurrence de sa quote-part dans l’habitation principale.
Désormais, la déductibilité du montant des intérêts n’est plus limitée à concurrence de la quote-part dans l’indivision.
 
3 - Mesures spécifiques à la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA)
Suppression de l’accord préalable pour la détermination du prorata de déduction
La LF 2016 a modifié l’article 104-I du CGI. En effet, la détermination du prorata annuel de déduction lorsque des entreprises englobent des secteurs d’activité réglementés différemment au regard de la taxe sur la valeur ajoutée peut être effectuée distinctement pour chaque secteur, sans que l’accord de l’administration fiscale ne soit requis.
 
Remboursement de la TVA grevant les biens d’investissement
On rappelle, qu’avant le 1er janvier 2016, le remboursement de la TVA était accordé aux contribuables réalisant des opérations exonérées ou en suspension de taxe en vertu des dispositions des articles 92 et 94 du CGI.
La LF 2016 a élargi le champ d’application du remboursement de la TVA pour couvrir les biens d’investissement à l’exception du matériel, mobiliers de bureau et des véhicules de transport de personnes autres que ceux utilisés pour les besoins de transport public ou de transport collectif du personnel.
Ainsi, à compter du 1er janvier 2016, la taxe grevant les biens d’équipement, matériel et outillages acquis par les contribuables, ouvre droit au remboursement conformément aux nouvelles dispositions codifiées au nouvel article 103 bis du CGI, à l’exclusion de ceux acquis par les établissements et entreprises publiques.
Ce nouveau dispositif est applicable aux biens d’investissements acquis à compter du 1er janvier 2016.
 
Opérations exclues du droit à déduction
Le premier paragraphe de l’article 106-II est modifié comme suit par la LF 2016 :
"N’est pas déductible la taxe ayant grevé les achats, travaux ou prestations de services dont le montant dépasse dix mille (10 000) dirhams par jour et par fournisseur dans la limite de cent mille (100 000) dirhams par mois et par fournisseur, et dont le règlement n’est pas justifié par chèque barré non endossable, effet de commerce, moyen magnétique de paiement, virement bancaire, procédé électronique ou par compensation avec une créance à l’égard d’une même personne, à condition que cette compensation soit effectuée sur la base de documents dûment datés et signés par les parties concernées et portant acceptation du principe de la compensation."
 
4 - Mesures communes en matière d’assiette
Suppression de l’imputation de la cotisation minimale en matière d’IS et d’IR au titre des revenus professionnels et agricoles
Avant l’entrée en vigueur de la LF 2016, l’article 144 du CGI prévoyait que la cotisation minimale acquittée au titre d’un exercice déficitaire, ainsi que la partie de la cotisation minimale qui excédait le montant de l’impôt acquitté au titre d’un exercice donné, soient imputées sur le montant de l’impôt qui excédait celui de la cotisation minimale exigible au titre des exercices suivants jusqu’au troisième exercice qui suit l’exercice déficitaire ou celui au titre duquel le montant de ladite cotisation excède celui de l’impôt.
La LF 2016 a modifié les dispositions de l’article 144-I-E du CGI en supprimant le mécanisme précité d’imputation de la cotisation minimale.
La suppression de l’imputation de la cotisation minimale est applicable au titre des exercices ouverts à compter du 1erjanvier 2016.
La mise en œuvre de ce dispositif  posant un problème au regard du principe de non-rétroactivité de la loi, l’Ordre des Experts Comptables a attiré l’attention de la DGI, qui a précisé qu’à titre transitoire, le crédit de la cotisation minimale se rapportant aux exercices ouverts avant 2016 demeurait imputable au titre des exercices suivants jusqu’au troisième exercice qui suit l’exercice déficitaire ou celui au titre duquel le montant de ladite cotisation a excédé celui de l’impôt.
 
Obligation de mentionner l’identifiant commun de l’entreprise (ICE) sur les factures ou documents en tenant lieu délivrés aux clients
La LF 2016 prévoit l’obligation pour tous les contribuables de mentionner leur ICE sur les factures ou les documents en tenant lieu qu’ils délivrent à leurs clients, ainsi que sur toutes les déclarations fiscales prévues par le présent code.
En vertu de la circulaire du 14 janvier 2016, la DGI a décidé d’accorder aux contribuables un délai supplémentaire allant jusqu’au 30 juin 2016 pour se conformer à cette obligation.
 
Pièces justificatives de dépenses
La LF 2016 a complété les dispositions de l’article 146 du CGI en précisant que tout achat de biens ou services par un contribuable auprès d’un fournisseur soumis à la taxe professionnelle doit être réellement réalisé en plus d’être justifié par une facture régulière et probante établie au nom de l’intéressé.
 
5 - Sanctions
Sanctions pour infraction aux dispositions relatives au droit de communication
Les personnes qui ne respectent pas l’obligation de communiquer à l’Administration les documents et renseignements demandés:
"Sont sanctionnées par une astreinte journalière de cinq cents (500) dirhams, dans la limite de cinquante mille (50 000) dirhams, les personnes qui ne communiquent pas les informations demandées dans le délai et les conditions prévus à l’article 214-I ci-dessous."

Sanctions applicables en cas de rectification de la base imposable
La LF 2016 a modifié les dispositions de la loi fiscale en cas de rectification de la base imposable :
·                     le taux de majoration est désormais de 30% (contre 15% auparavant) lorsque les défaillants sont des collecteurs d’impôt (contribuables soumis à la TVA et à l’obligation de retenue à la source) ;
·                     pour les autres contribuables, ce taux passe à 20%.
6 - Procédures fiscales
Vérifications de comptabilité
À compter du 1er janvier 2016, les délais relatifs à la durée des vérifications de comptabilités sont ramenés respectivement à :
- 3 mois au maximum pour les entreprises déclarant un chiffre d'affaires H.T  inférieur ou égal à 50 millions de dirhams (contre 6 mois auparavant) ;
- 6 mois au maximum pour les entreprises déclarant un chiffre d'affaires H.T supérieur à 50 millions de dirhams (contre 12 mois auparavant).
La LF 2016 a précisé que les nouvelles dispositions de l’article 212 du CGI sont applicables aux opérations de vérification de comptabilité dont l’avis de vérification est notifié aux contribuables à compter du 1er janvier 2016.
 
Procédure accélérée de rectification des impositions
Le délai dans lequel l’inspecteur est amené à notifier aux contribuables les motifs, le montant détaillé des redressements envisagés et la base d’imposition retenue, prévu à l’article 221-I du CGI, est ramené à 3 mois (contre 6 mois auparavant) à partir de la date de fin du contrôle fiscal par la LF 2016.
 
Instauration d’une dérogation aux règles de prescription
La LF 2016 a complété l’article 232-VIII par un alinéa n° 15 permettant de prolonger le délai de prescription de 4 ans à 10 ans pour permettre la régularisation des contribuables n’ayant pas déposé leurs déclarations au titre des 10 derniers exercices non déclarés.
Le champ d’application de ce dispositif ainsi que sa mise en œuvre au regard du principe constitutionnel de non-rétroactivité de la loi demeure à être clarifié, notamment dans le cadre de la convention de partenariat du 8 février 2016 conclu entre l’Ordre des Experts Comptables et la DGI.
 
Instauration d’une procédure pour le dépôt des déclarations rectificatives
La LF 2016 a instauré une procédure pour le dépôt des déclarations rectificatives, codifiée au nouvel article 221 bis du CGI.
Cet article précise que lorsque l’Administration constate des erreurs matérielles dans les déclarations souscrites, elle invite le contribuable à souscrire une déclaration rectificative par lettre notifiée, en précisant la nature des erreurs matérielles constatées.
Cette déclaration rectificative doit être soumise dans un délai de 30 jours à compter de la date de réception de la lettre de notification.
Le contribuable peut également déposer une déclaration rectificative à sa propre initiative, lorsque, sans recourir à une vérification de la comptabilité, l’Administration a adressé à ce dernier une demande d’explication par rapport à des irrégularités relevées, et que le contribuable estime ces observations fondées.


Marc Veuillot est Partner Africa Practice, Managing Partner de CMS Bureau Francis Lefebvre Maroc
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